Une poésie absolument moderne

Dans les années 1870 personne dans les milieux littéraires ne s'attendait à une révolution dans la poésie et encore moins à ce que l'auteur de cette révolution soit un jeune provincial rustaud de 16 ans.

Pourtant, la rencontre de Rimbaud avec Verlaine à Paris va marquer un tournant décisif dans la littérature française. En l'espace de cinq ans à peine Rimbaud va changer le visage de la poésie. Les poèmes classiques d'abord puis la prose d'Une saison en enfer et enfin les vers libres des Illuminations.

Rimbaud est en avance sur son temps, à tel point que cinquante ans plus tard les surréalistes verront en lui un précurseur et s'inspireront de sa poésie.

J'écrivais des silences, des nuits, je notais l'inexprimable.
Je fixais des vertiges.

extrait d' "Une saison en enfer". 1873

En quête d'un nouveau langage.

S'il est un artiste dont l'oeuvre fut profondément marquée par la jeunesse et la révolte c'est bien Arthur Rimbaud.
La jeunesse d'abord, il serait même plus judicieux d'employer ici le terme de précocité car en effet, c'est entre 15 et 20 ans environs qu' Arthur écrit la totalité de son oeuvre.


Fait rare dans la littérature d'autant plus rare lorsque l'oeuvre en question est considérée comme incontournable dans l'histoire de la poésie. A 15 ans, Rimbaud a une tel maîtrise de la langue française que les poèmes qu'il écrit à cette période comme Sensation ou le Dormeur du val sont devenus aujourd'hui des références.

Vient ensuite la révolte. Révolte envers ses aînés (qu'il ne se privera pas de railler), révolte envers l'ordre établi, mais aussi et surtout révolte envers le carcan poétique de l'époque (alexandrin, hémistiche etc...) qu'il trouve au bout d'un certain temps trop lisse et trop prévisible ce qui le conduira à chercher une nouvelle forme de poésie.

Tableau de Paul Chabas représentant les poètes et peintres du Parnasse contemporain
Manuscrit du poème  Voyelle d'Arthur Rimbaud

Quand l'élève dépasse ses maîtres

Si au départ Rimbaud admire Baudelaire ainsi que les Parnassiens, dont on retrouve l'influence dans des poèmes comme Soleil et Chair ou Ophélie, il s'en détourne rapidement au profit d'une nouvelle quête du langage qu'il décrit en détail dans les lettres du voyant.

Cependant, il faudra attendre des poèmes comme Voyelles ainsi que ceux contenus dans le recueil des Derniers vers, (L'éternité , Chanson de la Plus Haute Tour etc...) pour voir dans l'écriture de Rimbaud la volonté de se dégager des formes "anciennes", rupture avec l'alexandrin, vers impairs, métrique aléatoire.

Vient ensuite le recueil d'Une Saison en Enfer, sorte de semi-confessions en prose dans lesquelles Rimbaud décrit, entre autre, son aventure poétique, Alchimie du verbe.

Vers de nouveaux horizons

Mais, c'est avec les poèmes des Illuminations (Aube, Marine etc...) que l'objectif décrit dans les lettres du voyant est réellement atteint.
Ici, l'écriture est totalement dégagée des formes poétiques classiques, les poèmes sont en prose et la métrique traditionnelle n'a pas cours. Rimbaud remplace avantageusement les rimes par des assonances ou des allitérations et invente sa propre rhétorique, ce n'est plus l'évasion "dans" le langage mais "par" le langage.

Pourtant, Rimbaud ne cherchera pas à faire éditer ces poèmes dont la date de création exacte n'est pas encore bien définie. Il semblerait qu'il les ait écrit à titre expérimental, et au coup par coup sans aucune intention de publication d'ailleurs, le titre "Illuminations" n'est pas de lui mais vraisemblablement de Germain Nouveau qui l'aida à recopier une partie de ces poèmes à Londres durant l'hiver 1873-1874.

Quoi qu'il en soit, lorsque les Illuminations seront éditées pour la première fois en 1886 dans la revue La Vogue, Rimbaud en aura fini depuis longtemps avec la poésie.

Horizon maritime avec reflets de soleil

Poésie

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