Faim, soif, cris, danse, danse, danse, danse !
Extrait d'Une Saison en Enfer. 1873
On n'est pas sérieux, quand on a dix-sept ans.
C'est aux états unis vers le milieu des années cinquante que le rock and roll voit le jour. Son effet sur la jeunesse américaine est sans précédent et il est immédiatement adopté par des millions de teenagers. Il est revendiqué au travers d'une attitude et d'un code vestimentaire rapidement mal vu par les parents et par l’Amérique bien pensante.
Les idoles du rock se nomment Chuck Berry, Gene Vincent, Elvis Presley ou encore Buddy Holy et, bien que les textes de leurs chansons soit assez simplistes, la musique est excitante, provocante et enflamme les jeunes esprits. Le cinéma s'empare du phénomène en mettant l'accent sur la révolte et le mal être.
Dans La fureur de vivre, James Dean incarne un adolescent rebel perdu entre ses parents qui ne le comprennent pas et une société qui le rejette. On ne peut s'empêcher de penser au jeune Rimbaud un siècle plus tôt, coincé entre l'autorité maternelle rigide et les mesquines pelouses de Charleville, multipliant les fugues et rêvant d'absolu.
L'amour est à réinventer.
Dans les années soixantes une nouvelle vague de musiciens comme les Beatles, Bob Dylan ou les Doors vont commencer à intégrer dans leurs chansons des textes plus profonds. Ceux-ci, mélangés aux accents rock contenus dans la musique vont donner naissance à une nouvelle forme de poésie.
Bob Dylan, grand admirateur de Rimbaud, sera l'un des précurseurs. Sa façon d'aborder des thèmes délicats sous un angle poétique prouve au monde que le rock n'est pas qu'une musique bruyante et simpliste mais peu aussi soulever de vrai questions et les traîter avec profondeur et sensibilité. Dylan n'est pas le seul à apprécier l'homme aux semelles de vent, le mouvement hippie qui émmerge vers les années 66,67 voit en lui un autentique "freak", et sa poésie du voyage ne peut qu'enchanter les beatniks partant en masse "faire la route" du coté de Katmandu.
Les adeptes des drogues psychédélique (LSD, mescaline etc...) trés en vogue à l'époque, parlent d'ouverture de conscience et de révélations, et beaucoup d'artistes s'inspirent des visions provoquées par ces drogues. Cette démarche n'est pas sans rappeler celle décrite par Rimbaud dans les lettres du voyant. Vers la fin des années soixante un vent de révolution souffle sur le monde.
Que ce soit les Rolling Stones qui prônent une sexualité sans tabous ou Jim Morrison et les Doors qui veulent le monde "maintenant", le rock est plus que jamais le reflet des aspirations de tout une génération. Amour libre, rejet des vieilles valeurs, refus de l'autorité parentale, la jeunesse est bien décidé à tout remettre en question... "l'amour est à réinventer on le sait".
Toute lune est atroce et tout soleil amer.
Au milieu des années soixante dix, un nouveau courant musical voit le jour dans le club new-yorkais le CBGB's. De jeunes musiciens y jouent un rock brute et sans concession en réponse au 'vétérans" du rock qui commence à s'assagir et à s'embourgeoiser. On croise au CBGB's des groupe comme the Ramones, Television, Blondie ou encore Patti Smith, véritable adoratrice de Rimbaud qu'elle cite abondamment dans ses chansons.
Pourtant, ce n'est pas à New York que va exploser cette rébellion électrique mais à Londres avec l'arrivé des Sex Pistols, ce qui va donner naissance au mouvement punk. Ici l'outrage et la provocation atteignent leurs paroxysmes, la musique est violente et agressive, les texte sont provocants parfois même insultants et "no futur" reste le mot d'ordre.
Bien que Rimbaud n'a jamais été un nihiliste, il n'est pas en reste en ce qui concerne la provocation et peut être considéré comme le premier véritable punk. De sa tenue vestimentaire à son attitude provocante, tout chez lui était destiné à choquer et il n'a rien a envier aux punks des années soixante dix.
Et en France ?
On ne peut pas dire que le rock a été très florissant dans la patrie de Rimbaud.
Bien sûr de nombreux groupes ont émergés mais n'ont jamais atteints (à tous les niveaux) la dimension de leurs homologues anglais et américains.
En France à cette époque, pour trouver une musique qui véhicule un message fort et poétique il faut se tourner vers la chanson dite "à texte".
Brassens, Brel, Gainsbourg, Barbara sont tous féru de poésie et connaissent très bien celle du poète ardennais.
Il n'est pas rare d'entendre les noms de Rimbaud ou de Verlaine cités dans leurs chansons.
"Comme dit si bien Verlaine au vent mauvait" dans "Je suis venu te dire que je m'en vais" de Serge Gainsbourg, ou encore "L'un s'appelait Verlaine, L'autre, c'était Rimbaud" dans "L'absinthe" de Barbara.
Toutefois, le plus sensible à la poésie du jeune voyant reste évidemment Léo Férré qui a d’ailleurs mis plusieurs des poèmes de Rimbaud et de Verlaine en musique.